Comprendre les intrants en viticulture biologique : ce qui est autorisé et ce qui est interdit

27 février 2025

Les principes fondamentaux de la viticulture biologique

Avant de passer aux détails des intrants, rappelons les fondements de la viticulture biologique. Travailler en bio signifie agir selon un cahier des charges strict, défini en Europe par le Règlement CE n° 834/2007, complété par d’autres textes au fil des années. L’objectif ? Préserver la biodiversité, maintenir la fertilité naturelle des sols et limiter les interventions chimiques de synthèse.

Les intrants, qu’ils soient utilisés dans les vignes ou en cave, doivent répondre à un triple impératif : être naturels ou d’origine naturelle, s’intégrer dans une logique de respect de l’environnement et se limiter au strict nécessaire. C’est ici que tout se joue : ce "strict nécessaire" varie fortement selon les contextes (région, climat, état du sol ou de la vigne).

Quels intrants sont autorisés à la vigne en bio ?

En viticulture biologique, travailler la vigne demande une approche prophylactique, c’est-à-dire privilégier des actions préventives pour éviter les maladies plutôt que de les traiter après coup. Malgré tout, certains intrants restent nécessaires pour protéger la vigne et garantir sa croissance. Voici les principaux :

Les traitements phytosanitaires autorisés

  • Le soufre : utilisé depuis des siècles, le soufre reste indispensable en bio pour lutter contre l’oïdium, un champignon redouté des vignerons. Il est autorisé à une dose maximale de 6 kg/ha/an (en substance active), selon les contextes climatiques.
  • Le cuivre : principal allié contre le mildiou, il est souvent appliqué sous forme de bouillie bordelaise. En bio, son utilisation est strictement réglementée, limitée à 4 kg/ha/an pour limiter son impact sur les micro-organismes du sol (source : Ministère de l'Agriculture).

Les fertilisants et amendements

La fertilité des sols est essentielle, mais en bio, il est hors de question de recourir à des engrais chimiques. On privilégie donc :

  • Le compost : issu de matières organiques naturelles, il nourrit durablement le sol et améliore sa structure.
  • Les engrais organiques autorisés : poudre de roche, algues ou guano, ces ressources naturelles enrichissent les sols de manière douce.
  • Les cultures d’engrais verts : semées entre les rangs de vignes, elles fixent l’azote dans le sol et limitent l’érosion.

Les bio-pesticides : un coup de pouce naturel

Plutôt que de recourir à des solutions chimiques, la viticulture biologique mise sur des solutions naturelles comme :

  • Les extraits végétaux (ortie, prêle, fougère), appliqués en pulvérisation pour renforcer les défenses des vignes.
  • Le bacillus thuringiensis, une bactérie utilisée pour lutter contre certains insectes ravageurs sans nuire aux pollinisateurs.

Quels intrants sont interdits en bio ?

Les produits chimiques de synthèse

Il s’agit là de LA grande différence avec l’agriculture conventionnelle. En bio, aucun produit chimique de synthèse n’est permis. Cela inclut :

  • Les herbicides : en viticulture bio, le désherbage est mécanique (ou manuel).
  • Les fongicides et insecticides chimiques : on mise sur les substances naturelles et une observation attentive de la vigne.

Les engrais artificiels

Les engrais chimiques riches en azote, phosphore ou potassium (les fameux NPK) sont strictement interdits. Ils favorisent des déséquilibres dans les sols et sont souvent énergivores à produire.

Les intrants controversés dans certains contextes

Certains produits tolérés ailleurs ne sont pas admis dans le cahier des charges bio. Par exemple :

  • Les régulateurs de croissance (hormones végétales) employés pour limiter la taille des grappes.
  • Les produits systémique : des solutions qui pénètrent à l’intérieur des tissus de la plante et ne respectent pas les principes de surface propres à l’agriculture biologique.

Et en cave, que peut-on utiliser en bio ?

Le travail en cave en bio répond également à un règlement précis. Si la priorité reste de protéger le raisin et de limiter les interventions, certains intrants œnologiques sont autorisés, d’autres interdits.

Les intrants autorisés en cave

  • Les levures biologiques : bien qu’on privilégie les levures indigènes (celles naturellement présentes sur les raisins), les levures sélectionnées certifiées bio peuvent être utilisées en cas de fermentation difficile.
  • Le dioxyde de soufre (SO2) : il reste permis pour ses propriétés antioxydantes et antimicrobiennes, mais avec des teneurs maximales strictes (100 mg/L pour les rouges bio et 150 mg/L pour les blancs bio, contre 150 et 200 mg/L en conventionnel).
  • Les agents de collage naturels : blancs d’œufs bio, bentonite ou caséine, notamment.

Les produits interdits

  • Les levures génétiquement modifiées (OGM).
  • Les enzymes ou tanins chimiques ajoutés pour modifier le goût ou la texture.
  • Les sucres de chaptalisation non biologiques.

Un travail exigeant mais passionnant

Travailler en bio, que ce soit à la vigne ou en cave, demande une remise en question constante et une observance stricte des règlements. C’est un véritable défi au quotidien, mais aussi une aventure riche de sens, où chaque gorgée de vin raconte une histoire authentique, celle du vivant.

Alors, la prochaine fois que vous dégusterez un vin bio alsacien, pensez à tout ce travail invisible, à la richesse des sols préservés et aux choix courageux de ces vignerons. Pour moi, c’est cette passion et cette recherche d’équilibre qui font tout le charme de notre terroir.

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